Le glyphosate est-il oui ou non un agent cancérigène ? Les études se contredisent et les citoyens sont perdus.
Le glyphosate, cancérogène probable. Cette évaluation réalisée en 1995 par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), agence spécialisée de l’OMS, a été mise en doute par une étude parue dans le Journal of the National Cancer Institute en novembre 2017. Lire : Ce qu’il faut savoir sur le glyphosate
50 000 agriculteurs de l’Iowa et de Caroline du Nord
Cette recherche épidémiologiste, financée sur fonds publics et dirigée par une scientifique a priori indépendante, Laura Beane Freeman, épidémiologiste au National Cancer Institute, paraît très sérieuse. Pendant une vingtaine d’années, les chercheurs ont observé un échantillon de 50 000 agriculteurs travaillant dans l’Iowa et en Caroline du Nord. Soit la plus grande cohorte de travailleurs agricole suivis au monde. Environ un cinquième de cette population (9 300 personnes) n’étaient pas en contact avec le glyphosate.
Un risque pas plus élevé
Dès lors, il était possible de calculer si la prévalence de cancers était plus élevée, selon que l’on ait manié la molécule entrant dans la composition du Round up de Monsanto et de nombreux autres herbicides dans le monde. L’étude a montré que le risque de contracter un cancer n’était pas plus élevé que l’on soit ou non exposé à l’herbicide. Une nouvelle qui a dû réjouir les dirigeants de Monsanto.
Un biais dans l’étude
Peut-on s’en tenir à cette seule étude pour avoir une opinion sur le glyphosate, et les incidences sur la santé de ce type de molécules ? Probablement pas. D’abord, il pourrait y avoir un biais dans l’étude. Selon une scientifique de l’Université de Los Angeles (UCLA) en Californie, une variable a changé qui n’est peut-être pas totalement prise en compte par l’étude menée dans l’Iowa et la Caroline du Nord : le recours à l’herbicide a considérablement augmenté aux Etats-Unis entre le début des années 1990 et aujourd’hui, du fait de la généralisation des cultures transgéniques, résistantes à l’herbicide.
D’un peu moins de 6 000 tonnes (5 700 tonnes), on est passé à 125 000 tonnes. Ce déversement de pesticides a probablement exposé la population en général, et peut-être aussi, au passage, les travailleurs soit-disant non exposés de l’étude du National Cancer Institute.
Risque de lymphome non hodgkinien
D’autre part, d’autres études sont en cours de finalisation, dont une grande étude du North American Pooled Project (NAPP). Celle-ci accuse nettement le glyphosate. Les travaux menés montrent un doublement du risque de lymphome non hodgkinien chez les agriculteurs ayant manipulé du glyphosate plus de deux jours par an. D’autres études dites « cas témoins » vont déjà dans ce sens, a fait remarquer le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), qui ne semble pas près de revenir sur sa classification de « probable cancérogène ».
JC Nathan
Sources : Glyphosate et cancer, l’étude qui relance le débat. Stéphane Foucart. 22 novembre. Le Monde.
Glyphosate et cancer : une étude sème le trouble. Philippe Brochen. 21 novembre 2017. Libération.