Le grand public va devoir s’inquiéter d’une « nouvelle » catégorie de polluants particulièrement toxiques, les PFAS (prononcer « pifasses »), des substances per et poly-fluoroalkylées.
Qui connnait les PFAS (pifasses) ? Pas grand monde. Cette vaste famille d’une dizaine de milliers de composés est utilisée depuis le milieu du XX° siècle par les industriels dans de multiples produits : textiles, emballages alimentaires, mousses anti-incendie, gaz réfrigérants, revêtements anti-adhésifs, cosmétiques….
Du fait de la solidité de leurs liaisons chimiques (entre atomes de carbone et de fluor), ces substances persistent durablement dans l’environnement. Les PFAS, également surnommés « polluants éternels » sont classés dans une grande catégorie, les polluants organiques persistants (POP). Les POP (dioxine, furanes, DDT, PCB, pesticides divers…) sont persistants, bioaccumulables, toxiques et mobiles.
Multiples effets délétères
Les PFAS sont des produits chimiques aux effets délétères sur l’organisme humain : élévation du taux de cholestérol, effets cancérigènes, effets sur la fertilité et le fœtus, sur le foie, les reins, etc. Ils dérèglent probablement le système endocrinien (thyroïde) et le système immunitaire. A la fin de l’année 2023, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé l’un des principaux « pifasses », le PFOA comme « cancérogène pour l’Homme » (Groupe 1) et son cousin, le PFOS comme « peut-être cancérogène pour l’Homme » (Groupe 2B).
Scandale aux Etats-Unis
Le scandale des polluants éternels ou pifasses a éclaté aux Etats-Unis en 2001. Il a été prouvé que les usines de la firme DuPont qui produisaient du téflon pour les poêles avaient contaminé environ 70 000 personnes avec le PFOA (acide perfluorooctanoïque). Selon une enquête (Forever Pollution Project) menée par plusieurs medias européens, dont Le Monde , 23 000 sites en Europe rejettent ou stockent des doses anormales de PFAS.
En France, les sites de Pierre-Bénite au sud de Lyon, où sont installées les industries Arkema (chimie de spécialité), Daïkin (climatiseurs…) et Rumilly en Haute-Savoie (usines de poêle anti-adhésive) sont mis en cause dans le dossier des pifasses (PFAS).
16 millions d’Européens touchés par des pathologies
16 millions d’Européens, dont deux millions de Français, auraient déclenché des pathologies (cancers en particulier du rein, baisse de la fertilité, problèmes cardio-vasculaires…) dues à une exposition aux substances per- et polyfluoroalkylées. Il pourrait s’agir d’une des plus graves contaminations chimiques jamais découvertes.
Quelles sont les sources d’exposition à ces contaminants ? L’alimentation, notamment via les produits de la mer, les œufs et les viandes notamment, ainsi que l’eau. Les poussières et les sols contaminés sont également source de contamination.
Réglementation en cours d’élaboration
Face à ces risques de contamination, la règlementation est toujours en cours d’élaboration. La convention de Stockholm encadre en partie la production et l’utilisation de diverses familles de pifasses en les limitant à des usages spécifiques (photo-imagerie, céramiques filtres, fluides hydrauliques pour l’aviation, mousses anti-incendie…). En Europe, une poignée d’Etats membres (Suède, Norvège, Danemark, Pays-Bas, Allemagne) milite activement depuis 2023 en faveur d’une restriction globale des PFAS. Une interdiction des PFAS dans les mousses anti-incendie est en cours en Europe.
L’eau destinée à la consommation humaine est contrôlée en Europe (limite de qualité de 0,10 µg/L pour 20 PFAS et 0,50 µg/L pour la totalité des PFAS) et les autorités sanitaires françaises sont en train de s’en emparer. Pour autant, il semble que le niveau de contrôle de ces contaminants reste insuffisant compte tenu de leurs risques potentiels pour la santé humaine.
Lire : Graves polluants persistants dans l’eau
JC Nathan
Source : Anses