La recette du poulet américain au chlore

0
3056
poulet en batterie

poulet en batterie

Le poulet américain au chlore  joue les  premiers rôles dans les négociations en cours sur le traité de libre-échange entre l’Europe et les Etats-Unis. Retour en cuisine.

 

La recette du poulet au chlore américain est assez simple : prenez un poulet plumé prédécoupé, plongez-le pendant quinze secondes dans un bain de solution chlorée et autres substances désinfectantes (chlorure de sodium acidifié, phosphate trisodique, acides peroxycarboxyliques….). Le poulet est désinfecté et débarassé de ses salmonelles. Il est prêt à cuire.

 

Recours irresponsable aux désinfectants

 

Cette recette peu alléchante est pointée du doigt par les parlementaires européens et les aviculteurs. L’argument des partisans de l’embargo européen (en place depuis 1997) est le suivant : les éleveurs européens, contraints par la réglementation, ont mis en place une chaîne complète d’hygiène et de contrôle des risques sanitaires. Les Américains auraient fait l’économie de cette politique de qualité et compenseraient leurs lacunes par un recours irresponsable aux traitements désinfectants. Ce tableau est un peu caricatural.

 

Les risques pour le consommateur

 

Pour renforcer leurs positions protectionnistes, les défenseurs du poulet européen mettent en avant deux arguments santé : les effets nocifs des produits de traitement, la résistance anti-microbienne. Problème : ces points ne sont pas étayés sur le plan scientifique. Les substances antimicrobiennes utilisées et les quantités résiduelles sur les aliments ne sont pas sources de risques pour le consommateur, affirment les grandes autorités sanitaires (Agence de santé publique du Canada, OMS-FAO, EFSA).

 

Résistances antimicrobiennes

 

Second argument des anti-chlore, ces produits renforceraient les fameuses résistances anti-microbiennes, problème de santé inquiétant pour la communauté internationale (Lire à ce sujet : La résistance aux antibiotiques : un défi majeur). Les Salmonelles, Campylobacter et autres bactéries qui se développent dans les milieux confinés de l’élevage seraient de moins en moins bien combattues par les produits désinfectants. Or, cela n’est pas prouvé. Consultée sur ce sujet en 2008, l’Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait conclu que l’on ne disposait pas d’assez d’éléments pour infirmer ou confirmer cette thèse.

 

Baisse de la qualité pour le consommateur

 

La position protectionniste des aviculteurs européens n’est pas fondée d’un point de vue scientifique, mais elle est compréhensible sur le plan économique et social. L’industrie de la volaille aux Etats-Unis (plus de 20 millions de tonnes), celle de la Chine, ou du  Brésil pèsent bien plus lourd que celle de la France et même de toute l’Europe. L’ouverture des frontières pourrait être catastrophique pour un secteur déjà très éprouvé (cf. la faillite du Groupe Ledoux en 2013). En tirant les prix vers le bas, elle serait sans doute une mauvaise nouvelle pour la qualité et le consommateur.

 

Bernard Duran

 

Sources :

www.processalimentaire.com

www.ccnmi.ca

www.lemonde.fr

Photo : www.slowfood.fr