Gilles Daveau, cuisinier alternatif

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G Daveau cuisine alternative

G Daveau cuisine alternative

Issu de la restauration bio, consultant et formateur en restauration collective, animateur d’ateliers culinaires, Gilles Daveau se consacre à faire découvrir la « cuisine alternative ». Une cuisine simple et intelligente, attentive aux cuissons et aux saveurs, favorisant une alimentation diversifiée.

 

Quel regard portez-vous sur le modèle alimentaire occidental actuel ?

 

Il faut se garder des visions trop réductrices et négatives de l’alimentation, par exemple en la stigmatisant sous le seul angle environnemental, par la dénonciation de  l’agriculture intensive et des pesticides. N’oublions pas que le XX° siècle a apporté l’abondance alimentaire, la diversité et une certaine qualité, en particulier sur le plan sanitaire.

 

Cela dit, il faut bien reconnaître une forme de standardisation de l’alimentation et des goûts, une perte d’autonomie des territoires et un schéma alimentaire trop riche. Ce schéma est centré sur les protéines animales, accompagnées de légumes invariables et déconnectés des saisons, de féculents raffinés, d’excès divers (gras saturé, sucres…). C’est le corollaire de dérives agricoles, de pollutions, de gaspillages. Et il n’est pas garant d’une économie durable et d’un réel plaisir pour les convives.

 

Face à cette uniformisation, vous prônez la diversification alimentaire…

 

Se rapprocher des variétés saisonnières, valoriser les produits des terroirs sont des pistes de cette diversification, tout comme la réhabilitation des céréales et légumineuses qui permet un meilleur équilibre entre protéines animales et végétales.

La consommation de légumineuses, qui atteignait 16 kg par an et par habitant au début du XXème siècle, est dix fois inférieure aujourd’hui. Cette source très bon marché de fibres et de protéines peut permettre de consommer de façon moins massive la viande, qui peut ainsi être choisie plus chère mais meilleure, labellisée voire bio, pour soutenir des productions plus durables.

 

Pour améliorer l’alimentation quotidienne, vous réhabilitez ce que vous appelez la « cuisine nourricière » ?

 

Les macro-changements alimentaires s’ancrent dans le quotidien ordinaire des familles et des cantines : les cuisines nourricières doivent être bonnes, simples, économiques, variées et adaptées au contexte et au temps disponible. Plus que des recettes, il y faut une bonne compréhension des modes de préparation, de cuisson, d’assaisonnement qui valorisent sans gaspillage et au meilleur goût une viande, des légumes de saison, des céréales… et réenchantent la cuisine.

 

Cette base de savoir-faire sûrs permet d’oser découvrir des aliments moins connus. Un répertoire de nouveaux plats populaires s’invente : on peut décliner les ingrédients selon l’offre saisonnière et locale, les goûts de l’entourage, en conservant les plaisirs, du plus animal au plus végétal.

 

D’expérience, vous constatez dans tous les milieux un intérêt très vif pour l’alimentation et la cuisine. C’est en soi un facteur de changement des habitudes alimentaires ?

 

Quand les personnes comprennent le « pourquoi ? » de la cuisine, ce qui se passe dans la casserole, qu’elles l’associent à la découverte sensorielle, elles manifestent un intérêt nouveau, et s’approprient des solutions adaptées à leur mode de vie. La découverte gustative de poireaux, dont on a gardé le vert, étuvés à basse température, et de grains de sarrasin cuits à point dont la saveur rappelle la meilleure galette bretonne … suscitent de vrais chocs culturels. Une compréhension plus large de la cuisine et de l’alimentation amène ensuite à s’approvisionner, composer ses repas, cuisiner et manger « autrement ».

 

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