Jean-Michel Lecerf est chef du service de nutrition de l’Institut Pasteur de Lille, médecin nutritionniste, spécialiste en endocrinologie et en maladies métaboliques, auteur de nombreux ouvrages sur la nutrition. Il vient de publier chez Solar Santé, un ouvrage clair et pédagogique sur le cholestérol : « Le cholestérol décrypté ».
Qu’est-ce que le cholestérol ?
Le cholestérol est une molécule naturelle à la fois fabriquée par l’organisme et apportée par l’alimentation. Il est important pour la vie, les membranes des cellules, le cerveau, les hormones…. A contrario, il peut poser problème lorsqu’il est en excès dans le sang. Cela peut tenir à de nombreux facteurs. Certains facteurs génétiques ont une implication sur la fabrication du cholestérol par l’organisme ou son assimilation. D’autres sont d’ordre alimentaire.
Beaucoup de personnes souffrent d’un taux de cholestérol excessif ?
Effectivement, on estime que 20% de la population ont un taux trop élevé. Le mode de vie et le mode alimentaire sont en grande partie responsables du cholestérol dit ordinaire. Le cholestérol d’origine génétique (entre une personne sur 300 et une personne sur 200) est plus rare, mais il est plus fréquent qu’on ne le croit, et surtout mal dépisté.
La croyance habituelle « graisses saturées = cholestérol = encrassement des artères » est simpliste ?
Il n’y a pas de lien net et direct entre graisses alimentaires et cholestérol, ou encore entre graisses saturées et problèmes cardiovasculaires. Autrement dit, le gras ne bouche pas les artères. Certes, l’excès de cholestérol, lié éventuellement à un déséquilibre alimentaire, peut jouer un rôle négatif. Mais le risque d’accident cardiaque est lié en réalité à divers phénomènes : oxydation, fragilisation des artères, inflammation et enchaînement négatifs entre la formation d’une plaque d’athérome et la thrombose (caillot).
Pour autant, avoir une bonne alimentation est essentielle ?
Bien entendu. Adopter une bonne alimentation est toujours une bonne chose. Mais ce n’est pas toujours suffisant. D’autres aspects sont très importants : tabagisme, alcool, activité physique…
Quand l’excès de cholestérol est d’origine génétique, le problème du cholestérol se pose autrement ?
Le paysage des personnes ayant trop de cholestérol est très varié et suppose des prises en charge différentes. Certaines personnes sont excessivement inquiètes sur leurs chiffres de cholestérol. A l’inverse, des familles entières, dont des enfants très jeunes, sont atteints d’hypercholestérolémie d’origine génétique et ne sont pas dépistées. Or, l’un des facteurs de risque est l’exposition. Vous pouvez arriver à la trentaine et avoir eu du cholestérol depuis 30 ans, sans le savoir…. Si on dépiste et on traite un enfant ayant cette vulnérabilité, il ne fera jamais d’accident cardiovasculaire.
Dès qu’on parle de cholestérol, on évoque le dossier des statines, ce traitement anti-cholestérol qui a été systématiquement prescrit à de très nombreux patients, sous la pression des laboratoires….
C’est vrai qu’il y a eu des abus dans la prescription des statines, liés entre autres à une simplification abusive de l’approche et du traitement du cholestérol. A l’inverse, le discours anti-statines peut aussi nuire au traitement de certains patients, en particulier pour ceux atteints de cholestérol d’origine génétique.