Le réseau National Alimentation Cancer Recherche (NACRe) a mené une étude critique sur la littérature scientifique sur le jeûne et ses incidences sur le cancer. Les experts sont circonspects.
Le jeûne peut-il être efficace en traitement préventif du cancer ou/et durant la maladie ? La question se pose alors que la réputation du jeûne et sa pratique connaissent un renouveau en France et en Europe. En partenariat avec l’Institut National du Cancer (l’INCa), le réseau National Alimentation Cancer Recherche (NACRe) a mené une étude sur les connaissances scientifiques publiée fin 2017 sur cette question assez polémique.
Les régimes restrictifs : calorique, protéique, glucidique…
Diverses publications et reportages basés sur des expériences à l’étranger (aux Etats-Unis, en Allemagne et en Russie notamment) font état d’effets positifs du jeûne et des régimes dits restrictifs (restriction calorique, restriction protéique, restriction glucidique, régime cétogène (régime glucidique, avec maintien de l’apport calorique, donc hyperlipidique) pour diverses pathologies (cancers, épilepsie…). Le jeûne renvoie à des pratiques anciennes à la forte charge symbolique (purification, renouveau…).
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Etudes sur les animaux, résultats contradictoires
Les chercheurs ont analysé un corpus de 540 articles et revues scientifiques, ainsi qu’une soixantaine d’ouvrages grand public. Après examen et analyses, les experts de NACRe sont circonspects. Ils notent que la plupart des études scientifiques portent sur les animaux. Les études disponibles sur les régimes donnent des résultats assez contradictoires (effets positifs passagers, absence d’effets, effets délétères) et peu d’études étayent un effet positif des régimes sur les tumeurs.
Pas de concordances
Que ce soit les études portant sur le jeûne (intermittent ou non), ou sur les régimes restrictifs, il ne se dégage pas de concordances entre les études laissant entrevoir des effets positifs sur l’évolution tumorale, ou une amélioration des traitements de chimiothérapie.
Résultats hétérogènes, données limitées
Selon les scientifiques du NACRe, les études scientifiques, en majorité réalisées sur des animaux, donnent des résultats trop hétérogènes. Surtout, « les données chez l’Homme, issues d’études d’effectifs et de qualités variables, sont trop limitées pour conclure, et rares sont les études avec un suivi suffisant pour connaître l’observance et les effets à long terme », souligne le NACRe.
Risques de dénutrition et de sarcopénie
Les auteurs du rapport enjoignent à la plus grande prudence : la pratique du jeûne ou de régimes restrictifs présente un risque d’aggravation de la dénutrition et de la sarcopénie (fonte musculaire), deux facteurs pronostiques péjoratifs reconnus. De quoi relancer des polémiques et des émissions dans les médias.
JC Nathan
Sources : www6.inra.fr/nacre