Les crus du Beaujolais ont injustement été malmenés par le succès marketing du beaujolais nouveau. Il faut redécouvrir ces Gamay et leurs subtiles variations, d’un terroir à l’autre.
La réussite « marketing » du beaujolais nouveau, chaque troisième jeudi de novembre, a provoqué un sacré dommage collatéral : la dévalorisation d’une dizaine de crus de belle qualité aux noms évocateurs. Brouilly, côte de brouilly, régnié, chiroubles, morgon, fleurie, chénas, moulin à vent, juliénas et saint-amour, ces crus sont d’autant plus facilement mésestimés que 95% des beaujolais commercialisés sont de simples AOC beaujolais-rouge ou beaujolais nouveau.
Gamay noir à jus blanc
Qui dit beaujolais, dit gamay. Le cépage unique de l’appellation beaujolais a colonisé les côteaux granitiques entre Mâcon et Lyon. Le gamay noir à jus blanc s’appelait autrefois petit gamay, gamay rond, bourguignon noir. Fragile (sensible au gel, aux maladies…) mais fertile, le gamay donne des vins aux couleurs clairs, peu tanniques, chaleureux, aux arômes fruités (cassis, framboise, bonbon anglais…) et épicés (pivoine, poivre…).
Macération carbonique
Autre caractéristique du beaujolais, son type de vinification, la macération carbonique : le raisin, est déposé en deux temps dans la cuve. La première part de raisins est foulée et levurée, afin de produire une forte fermentation. Puis, on met l’autre partie de la récolte et le tout fermente pendant quatre à sept jours dans une cuve saturée en gaz carbonique. Cette vinification est à l’origine de vins aux arômes de fruits frais, sans tanins.
Brouilly et côte-de-brouilly
Le brouilly est un rouge parfumé, aux teintes de rubis, parfum de raisin frais, qui se boit relativement jeune. On le recommande sur des charcuteries, des volailles, des fromages à pâte cuite (emmental, comté, beaufort…). Le côte-de-brouilly est plus vigoureux, plus capiteux que le brouilly. Il vieillit bien et peut accompagner un plat goûteux comme le coq au vin.
Chenas, délicat et distingué
Le chenas est l’un des beaujolais les plus délicats et les plus distingués. Il peut se garder 5 à 6 ans. On peut le marier à des viandes rouges grillées, de l’agneau, des volailles, des viandes blanches en sauce, des fromages assez forts…. Servir entre 14 et 15°. Toujours dans la famille des « subtils », le Fleurie, dont on vante parfois le caractère féminin et le bouquet de parfums printaniers.
Juliénas, nerveux et charpenté
Le juliénas a une forte réputation auprès du grand public. La robe est d’un rubis intense et profond. Le bouquet d’arômes est varié (fraise, violette, cannelle, groseille, pivoine….). Le goût est nerveux et charpenté, discrètement épicé, avec une belle longueur en bouche. On peut laisser vieillir les bouteilles deux ou trois ans. Apparaissent alors des nuances de vanille et d’épice.
Les costauds : chiroubles et morgon
Le chiroubles est un beaujolais ferme, corsé, costaud, à boire jeune (deux à cinq ans) qui se marie bien avec des plats exotiques, plats cuisinés, agneau… Autre beaujolais costaud, le morgon : charnu, robuste, riche même si ses arômes sont délicats. Son charme le rapproche d’un bourgogne (il est parfois commercialisé sous une appellation bourgogne grand ordinaire, ou passe-tout-grains). Deux lieux-dits sont réputés pour ce cru : Les Charmes, la côte du Py. La robe est pourpre à reflets rubis, les arômes tendant vers les fruits à noyaux (abricot, pêche, cerise, prune…).
Moulin-à-vent : fin et parfumé
Le moulin-à-vent est un beaujolais vigoureux, charpenté, à la robe rubis foncé, fin et parfumé (arômes d’iris, roses fanées, épices, fruits mûrs). Selon les experts, son « caractère » tient à la présence de manganèse dans le sous-sol granitique. Il convient à toutes sortes de viandes et de plats carnés.
Deux saint-amour, le tendre et le puissant
Le saint-amour, à l’extrémité nord du Beaujolais, non loin des terroirs du saint-véran, est l’une des plus petites appellations du beaujolais : seuls une cinquantaine de viticulteurs l’élèvent. Ils font deux saint-amour issus de deux vinifications différentes : un vin tendre aux arômes fins et complexes de fruits rouges, pivoine, pêche… à consommer dans les 12 à 15 mois ; un vin puissant plus gras, plus charpenté aux arômes de kirsch, d’épice et de réséda… à consommer dans les quatre à cinq ans.
Régnié : fruits rouges et légers tanins
Le régnié est un cru récent du Beaujolais (1988). Il est récolté à Régnié-Durette. Sa robe est d’un rouge oscillant entre cerise et rubis. Ce vin parfumé et rond dégage des arômes de fruits rouges (framboise, groseille, mûre, cassis…), structuré par de fins tanins.
JC Nathan
Sources : Vin sur vin. Michel Droulhiole. Leduc Editions. 2006.
www.beaujolais.com
Photo :Florent Durand (Lancié) pour e-vigneron.com