Suite à l’adoption probable en 2014 d’une loi proposée par le Sénat, les villes françaises devraient bannir en 2020 l’usage de pesticides pour l’entretien des espaces verts, mais l’agriculture semble incapable de faire sa révolution environnementale.
Lancé en 2008, le plan national Ecophyto lié aux accords de Grenelle prévoyait de réduire l’usage de pesticides de 50% entre 2008 et 2018. Or, les dernières évaluations montrent que l’agriculture française reste un très gros utilisateur de produits chimiques (herbicides, fongicides, insecticides). La France a consommé environ 63 000 tonnes de produits en 2012, ce qui en fait le premier utilisateur en Europe et le quatrième consommateur mondial après les Etats-Unis, le Brésil et le Japon. Et elle semble incapable d’inverser la tendance.
Des pays plus polluants à l’hectare que la France
Ce leadership de la France est en partie lié à l’importance de la surface agricole utile (29 millions d’hectares). A l’hectare, les Pays-Bas (17,5 kg par ha), la Belgique (10,7 kg par ha, l’Italie (7,6 kg par ha) sont des pays plus polluants que la France. L’agriculture française épande néanmoins environ 4,4 à 5 kg de produits pesticides par hectare.
Le maïs, le colza, la vigne, premiers utilisateurs
En valeur absolue, les tonnages de pesticides ont baissé par rapport au début des années 2000 (environ 100 000 tonnes à l’époque). Mais ces chiffres sont trompeurs car les molécules utilisées sont de plus en plus puissantes et leur portée toxique, à quantité équivalente, est bien plus élevée (cf. Pesticides : des substances hautement toxiques). L’utilisation des pesticides est concentrée sur les grandes exploitations céréalières – en particulier le maïs, sur le colza, la vigne (utilisation de soufre). Les herbicides sont les plus vendus, notamment le glyphosate.
90% des eaux de surface sont touchées
Après des décennies d’utilisation intensive de produits chimiques, les conséquences pour l’environnement, aussi bien les sols, l’air que l’eau sont très sérieuses. 90% des eaux de surface présentent des traces de pesticides (Cf. La pollution des rivières et des cours d’eau : des signes inquiétants pour la France). Les rivières, les nappes phréatiques, l’air contiennent des résidus chimiques, exposant quotidiennement la population et les personnes fragiles (enfants, femmes enceintes, personnes âgées…).
Pluies, brumes et brouillards
Dans l’eau, l’atrazine et ses différents métabolites sont les principaux responsables des dépassements des limites admissibles sur l’eau potable. Personne n’est à l’abri car les produits chimiques utilisés se volatilisent et sont redéposés par les précipitations pluvieuses, les brumes et les brouillards (30 à 60 fois plus contaminées que les pluies).
Les conséquences exactes sur la santé sont très difficiles à évaluer : on soupçonne que cette contamination chimique silencieuse favorise différentes pathologies telles que les maladies neurodégénératives (type maladie de Parkinson, Alzheimer), des cancers (cancers du sang, prostate, myélomes, etc.), des perturbations endocriniennes (infertilité…) (cf. Pesticides et cancers : les indices s’accumulent). Il semble urgent d’agir avant d’avoir confirmation de ces effets délétères.
Bernard Duran
Sources : Pesticides Effets sur la santé – Inserm 2012
Appel de Montpellier : passer à un niveau supérieur d’alerte et de prévention pour limiter les risques sanitaires et écologiques des pesticides