La fusion en cours entre l’américain Monsanto et l’allemand Bayer, doublée du rapprochement entre le suisse Syngenta et le chinois ChemChina, constitue à bien des égards une menace pour l’environnement et l’indépendance du monde agricole.
Monsanto-Bayer, Syngenta-ChemChina, deux fusions qui suivent de près celle de Dow-DuPont… En s’alliant, ces firmes multinationales sont en train de constituer des groupes d’une puissance sans précédent, maîtres de deux domaines agricoles clés, les pesticides et les semences. Pour rappel, Bayer pèse d’ores et déjà 23 milliards d’euros et emploie 140 000 personnes. L’allemand va débourser quasiment 60 milliards d’euros pour absorber le géant américain de la chimie Monsanto. C’est dire combien il défendra cher les produits phare de l’agrochimie, qu’ils soient contestés ou non par l’opinion publique.
Diffuseurs de néonicotinoïdes
Car, Bayer comme Monsanto sont les grands diffuseurs des néonicotinoïdes, une famille de pesticides très problématique, notamment pour les pollinisateurs. Monsanto (mais aussi Bayer) est le champion toutes catégories de l’herbicide glyphosate (Roundup), déversé dans le monde entier par les agriculteurs et les jardiniers particuliers, avec des dommages pour la santé et l’environnement que l’on a pas fini d’évaluer.
Lire aussi :Les néonicotinoïdes, la menace invisible
Le marché mondial des semences partagé entre trois ou quatre groupes
L’autre activité phare des grands de l’agrochimie, ce sont les semences (avec pour sous-dossier sensible les semences OGM). Selon la Confédération paysanne (syndicat agricole « de gauche »), l’ensemble Bayer-Monsanto détiendra environ 27% du marché mondial des semences. A terme, trois ou quatre groupes contrôleront les cultures dans le monde, l’ensemble des filières agricoles, et tenteront au passage de faire disparaitre les filières indépendantes des semences.
Ces groupes justifient leur puissance démesurée en arguant du fait qu’ils jettent les bases d’une agriculture moderne du troisième millénaire, seule capable de nourrir la planète. Le problème, c’est que leur façon d’opérer et leur vision du monde ne laissent pas de place aux modèles alternatifs.
Puissance du lobbying
La puissance de lobbying de ces groupes est déjà énorme. Elle s’exerce directement auprès des parlements, des représentants de la Commission européenne, ou indirectement par le biais d’études scientifiques plus ou moins dirigées, plus ou moins tronquées, de centres d’études sous contrôle, de médias sous influence, de publicité, etc. Pour les différentes instances représentant les pouvoirs publics ou l’intérêt général, il devient très difficile de résister à ces pressions et à adopter des règlementations de protection des citoyens et de l’environnement.
Lire : Bayer-Monsanto, une menace pour l’environnement
Dès que leurs intérêts sont menacés, ces groupes brandissent l’arme stratégique de la menace à l’emploi. « Vous voulez limiter notre liberté d’agir et de vendre ? Nous fermons nos usines et nous délocalisons… « . La Commission européenne, tout comme les autorités américaines, avaient déjà bien du mal à maîtriser l’appétit insatiable de parts de marchés de ces géants. L’avenir qui se profile est encore moins rassurant.
JC Nathan