Ce ne sont pas les aliments (pas même les aliments gras et sucrés) qui font grossir. C’est notre rapport à l’alimentation. Il est possible de revenir à l’équilibre, sans s’infliger un régime restrictif, plaide le Dr Jean-Michel Lecerf.
Grossir n’est pas une fatalité. Le corps est une mécanique très élaborée qui régule idéalement la prise alimentaire en fonction de ses besoins. En particulier, l’enchaînement faim (source de déplaisir) – appétit (source de plaisir) – rassasiement (arrêt de l’alimentation) – satiété (non-faim). Les mécanismes du désir et du plaisir sont tels qu’ils nous poussent à diversifier notre alimentation, source de santé.
Lire : Le surpoids, on peut s’en sortir
Quand tout se dérègle
Malheureusement, il arrive que tout se dérègle. Dans un ouvrage très pédagogique et très clair, Le surpoids, c’est dans la tête ou dans l’assiette ? (Editions Quae), le Dr Jean-Michel Lecerf rappelle des vérités méconnues ou rarement énoncées par les spécialistes. Ce ne sont pas les aliments (pas même les aliments gras et sucrés) qui font grossir. C’est notre rapport à l’alimentation. C’est notre façon de manger.
L’abondance pousse à manger
De nombreux perturbateurs de notre comportement alimentaire existent. Première source de dérèglement, l’abondance (omniprésence alimentaire) qui conduit à manger en permanence, n’importe quand et en l’absence de vrai besoin.
Le stress, l’émotivité
Le stress fait manger certaines personnes davantage, tout particulièrement les personnes en restriction alimentaire (en train de faire un régime). Les aliments gras et sucrés sont privilégiés car ils ont un effet rassurant. L’émotivité (et l’excès d’émotions) peut également pousser de façon excessive vers une alimentation apaisante et rassurante.
La sédentarité, les écrans
L’ennui, l’inactivité, la sédentarité, les écrans poussent de nombreuses personnes (les enfants notamment) à manger de façon automatique. Selon Jean-Michel Lecerf, la consommation d’aliments hyperpalatables (très bons au palais) et hyperstimulants (biscuits, etc) conduisent à ne plus tenir compte des signaux de faim et de rassasiement. La disparition du repas familial, pris en présence des proches, représente la perte d’un guide essentiel à la régulation alimentaire.
La restriction conduit toujours à craquer…
Comment se remettre sur le chemin de l’équilibre alimentaire ? Certainement pas en misant sur les restrictions alimentaires, source de frustrations, d’inquiétudes et de rechutes, estime le Dr Lecerf. « La restriction conduit toujours à craquer, ce qui culpabilise et renforce la mésestime de soi, l’idée que l’on ne vaut rien, que l’on manque de volonté. En remangeant, on grossit et le cercle vicieux est alimenté. » assène-t-il sans embage.
Selon cet endocrinologue, la seule voie possible est de pacifier sa relation à l’alimentation, apprendre à l’aimer plutôt qu’à la craindre, pacifier sa relation avec soi-même. Il faut améliorer son alimentation, mais certainement pas en s’imposant un régime restrictif, privatif, hypo-quelque chose (hypocalorique, hypoglucidique, hypolipidique).
Stratégie des petits pas
Seule la stratégie des petits pas peut réussir. Exemples : suppression de boissons sucrées, arrêt des apéros et biscuits apéritifs, reprise d’une activité physique…. En parallèle, il faut dans la mesure du possible lutter contre le stress, la fatigue, les émotions qui sont souvent source des dérèglements alimentaires.
Le réapprentissage
Mieux s’alimenter, c’est réapprendre. Apprendre à manger posément, calmement, avec attention et plaisir les aliments. Apprendre à manger quand on a faim, à ne pas manger quand on a pas faim, à s’arrêter de manger quand on est rassasié, à ne pas continuer une fois le plaisir atteint.
L’art de la diététique passe par la diversité et la modération. La diversité permet de couvrir les besoins nutritionnels. Le docteur Lecerf cite le chiffre de 14 aliments différents par jour et de 30 à 40 aliments différents par semaine. La modération elle consiste à manger juste ce qui suffit à satisfaire (en quantité et en plaisir).
Aurélie Laroche
Source :
Le surpoids, c’est dans la tête ou dans l’assiette. Dr Jean-Michel Lecerf. Editions Quae. 2019.
Photo : lesprogrammesdelaforme.com