Catherine Renard, coordonnatrice Optifel (aliments pour seniors)

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C.Renard chercheuse Inra

C.Renard chercheuse Inra

« Faire des aliments plus attrayants pour les seniors »

 

Initié par l’Inra, le projet européen Optifel vise à concevoir des produits à base de fruits et de légumes adaptés aux seniors.  Catherine Renard, directrice de recherche, coordonne le projet qui regroupe 26 partenaires européens (centres de recherche, instituts universitaires, entreprises).

 

Comment est né Optifel ?

 

L’origine du projet Optifel tient dans un constat : la société va compter de plus en plus de seniors. Ces personnes sont confrontées à diverses difficultés, des problèmes masticatoires, notamment, des préoccupations nutritionnelles.

L’offre actuelle d’aliments adaptés à cette population n’est pas satisfaisante : la gamme des produits à « texture modifiée » est courte, les produits se ressemblent et donc les consommateurs se lassent. On peut faire mieux, plus varié et plus attrayant, avec des propriétés nutritionnelles équivalentes ou meilleures.

 

Il y a aussi un souci de dénutrition avec les personnes âgées ?

 

C’est une vraie préoccupation. Chez les personnes âgées, l’envie de manger s’atténue. Elles mangent moins, leurs muscles s’affaiblissent. Il y a des risques d’accidents et d’hospitalisation avec à la clef, des difficultés de renutrition. Une spirale négative, en quelque sorte.

 

Optifel vise à élaborer une gamme de produits seniors à base de fruits et légumes. Pourquoi se centrer sur les fruits et légumes ?

 

La diversité des fruits et légumes, des goûts et des textures est très large. Les personnes âgées en mangent facilement alors qu’elles éprouvent parfois du dégoût pour la viande, ou une forme de « ras-le-bol » des produits laitiers. Les fruits et légumes font partie du répertoire alimentaire des seniors, de leurs habitudes. Dernière considération, relativement peu d’avancées ont été réalisées dans le domaine de la transformation alimentaire des fruits et légumes et on peut espérer faire des progrès importants.

 

Quels types d’aliments pensez-vous mettre au point ?

 

L’idée est d’aller vers des produits encore structurés qu’on peut manger à la fourchette ou avec les doigts : des produits intermédiaires plus solides que la purée, moins durs et plus faciles à manipuler que les produits frais. Ces aliments pourraient être complémentés en vitamines, protéines, matières grasses. A partir de 70 ans, le risque d’un surcroît de matières grasses ne se pose plus en général, et du coup, on peut faire des produits plus riches, plus crémeux, plus denses en calories.

 

Le projet comporte aussi des aspects sanitaires…

 

Les personnes âgées sont fragiles et vulnérables aux attaques microbiennes. Or, il y a souvent des temps longs entre le moment où est préparé le repas (que ce soit dans le cadre d’une maison de retraite ou d’un système de portage à domicile), et la consommation du repas. La lenteur de la prise de repas peut aggraver aussi les risques de développement des micro-organismes.

 

Grâce aux procédés de traitement (chauffage micro-ondes, haute pression hydrostatique…), les produits pourraient être stables à l’ambiant et rester emballés le plus longtemps possible. Du coup, on pourra présenter un choix de soupes, de sauces, de desserts… sans la contrainte du périssable. Cela permettra d’individualiser le choix et de sortir des contraintes de la restauration collective où tout le monde doit manger la même chose.

 

Les produits vont être testés en  réel ?

 

Nous testerons les produits auprès de consommateurs seniors afin de recueillir leur estimation hédonique. L’originalité du projet Optifel est de ne pas se cantonner à une recherche sur le plan de la nutrition, mais d’aller, avec les industriels, jusqu’à l’élaboration  et la validation de produits nouveaux. Nous réaliserons aussi des cahiers des charges pour pérenniser les acquis de ce projet et permettre à d’autres acteurs de faire des produits équivalents.

 

Combien de temps vous donnez vous ?

 

Le projet doit être bouclé dans trois ans et demi.